Nike SB Dunk : Comment une chaussure de basket est devenue le Saint Graal des sneakerheads

Des parquets universitaires aux spots de skate

1985 : tout commence sur les terrains de basket

L'histoire de la Dunk, c'est d'abord celle d'une chaussure de basket qui ne ressemblait à aucune autre. En 1985, Peter Moore (le génie derrière l'Air Jordan 1) fait un coup de maître : il pioche les meilleurs éléments de trois modèles existants – l'AJ1, la Terminator et l'Air Force 1 – et les fusionne pour créer ce qu'on appellera d'abord la "College Color High".

À l'époque, c'est la révolution. Pourquoi ? Parce que dans un monde où les chaussures de basket sont blanches, point final, Nike débarque avec sa campagne "Be True To Your School" et balance douze coloris aux couleurs des plus grandes universités américaines. Les étudiants peuvent enfin porter leur fierté universitaire jusqu'au bout des pieds. Le concept cartonne instantanément.

L'adoption inattendue par les skateurs

Mais voilà où l'histoire devient vraiment intéressante. Au début des années 90, les Dunks et les Jordan 1 se retrouvent soldées dans les rayons. Les skateurs, toujours à l'affût du bon plan, découvrent ces chaussures robustes vendues pour une bouchée de pain. La semelle accroche parfaitement sur le grip, le cuir résiste aux ollies répétés... Bingo ! Sans le savoir, Nike venait de créer la chaussure de skate parfaite.

Les skateurs adoptent massivement la Dunk. Dans les skateparks de Californie comme dans les spots de rue de New York, elle devient omniprésente. Nike observe ce phénomène avec intérêt, et les rouages commencent à tourner dans les bureaux de Beaverton.

2002 : la naissance de Nike SB et la révolution Dunk

Sandy Bodecker change la donne

Au tournant du millénaire, Nike décide de prendre le skate au sérieux. Ils confient les rênes à Sandy Bodecker, un visionnaire qui comprend une chose essentielle : pour réussir dans le skate, il faut écouter les skateurs, pas leur imposer des produits.

Sa première décision ? Ramener la Dunk, mais en version améliorée pour le skate. La Nike SB Dunk naît officiellement en 2002, et ce n'est pas juste un nouveau coloris. Non, on parle d'une refonte technique complète : une languette ultra-rembourrée (le fameux "fat tongue"), un amorti Zoom Air au talon pour encaisser les impacts, et une semelle intérieure en mousse Poron – du jamais-vu dans le skate à l'époque.

Les "Colors By" et la naissance d'un mythe

Pour le lancement, Bodecker fait dans le smart. Il confie les premiers coloris aux riders de l'équipe : Gino Ianucci, Reese Forbes, Danny Supa et Richard Mulder créent chacun leur version dans la série "Colors By". Le message est clair : cette chaussure appartient aux skateurs.

Mais le coup de génie arrive la même année avec la collaboration Supreme. En utilisant le motif éléphant de la Jordan 3 sur une Dunk, Nike crée l'hystérie. Les collectionneurs découvrent la SB Dunk, et plus rien ne sera jamais pareil.

L'ère des collaborations légendaires

2003-2004 : l'explosion créative

Ces deux années marquent l'âge d'or des SB Dunk. Le "City Series" débarque avec des paires dédiées à Paris, Tokyo, Londres et la mythique "Pigeon" de New York. Des collabs avec Zoo York et Chocolate suivent. Nike instaure même les "Box Color Eras" – chaque période a sa couleur de boîte, permettant aux fans de dater leurs paires comme des millésimes de vin.

C'est aussi l'époque où Nike comprend le pouvoir de la rareté. Les quantités sont limitées, la distribution passe exclusivement par les skate shops indépendants. Résultat ? Des campements nocturnes, des files interminables, et parfois même des émeutes.

Les Grails : ces paires qui rendent fou

La Freddy Krueger (2007) : Le Saint Graal absolu. Inspirée du tueur des Griffes de la Nuit, elle a été retirée suite à une action en justice. Moins de 30 paires ont survécu. Si vous en croisez une, vous regardez probablement 50 000 dollars minimum.

La Pigeon de Jeff Staple (2005) : 150 paires seulement, une émeute devant Reed Space à New York, la police appelée en renfort... Cette paire a littéralement lancé la culture de la revente moderne.

La Yellow Lobster (2009) : 36 paires produites. Oui, vous avez bien lu, trente-six. Avec son élastique façon homard et sa doublure pique-nique, c'est le fantasme ultime du collectionneur.

Les Friends & Family : Que ce soit la Parra (2019), la Travis Scott (2020) ou la récente Jarritos (2023), ces versions ultra-limitées réservées aux proches des artistes sont le niveau au-dessus du Grail. On parle de 20-50 paires maximum dans le monde.

Le système des raffles : pourquoi c'est si dur d'avoir une paire

La fin du "premier arrivé, premier servi"

Vous vous demandez pourquoi c'est mission impossible d'acheter une SB Dunk au retail ? Bienvenue dans le monde merveilleux des raffles. Après les émeutes et les campements qui ont marqué les années 2000, Nike et les retailers ont dû trouver une solution.

Les raffles, c'est simple en théorie : vous vous inscrivez, le tirage au sort désigne les gagnants, ils achètent la paire. En pratique ? C'est la loterie, avec des chances de gagner parfois inférieures à 1%. Entre les bots qui trustent les inscriptions en ligne et le nombre hallucinant de participants, décrocher une paire relève du miracle.

La "drop culture" et ses dérives

Cette rareté organisée a créé un monstre : la drop culture. Chaque sortie devient un événement, chaque paire limitée une obsession. Les prix sur le marché secondaire explosent – une paire à 100 dollars peut se revendre 1000 dollars le jour même. C'est devenu un business à part entière, avec ses codes, ses acteurs, et malheureusement ses dérives.

2020-2025 : le grand retour

La renaissance spectaculaire

Après une période de creux dans les années 2010 (oui, même les légendes ont leurs passages à vide), la SB Dunk revient en force en 2020. Les collaborations s'enchaînent à un rythme effréné : Ben & Jerry's avec sa Chunky Dunky qui sent la glace, les Grateful Dead en fausse fourrure, Travis Scott et ses motifs bandana...

Le Covid et le confinement amplifient le phénomène. Coincés chez eux, les gens se passionnent pour les sneakers. Les prix s'envolent, l'application SNKRS de Nike devient le casino des temps modernes.

Nike Travis Scott Streetart thonon

L'innovation continue

Nike ne se repose pas sur ses lauriers. La Air Dunk Jumbo arrive avec sa silhouette XXL, la série Crater utilise des matériaux recyclés, les collabs deviennent de plus en plus créatives. En 2025, le calendrier est déjà blindé : Limosine Skateboards, Bronx Girls Skate, Arts-Rec, Nardwuar... Sans oublier le retour de Supreme prévu pour mai.

Ce qui est génial, c'est la diversification. On ne parle plus seulement de skate masculin californien. Des collectifs féminins, des artistes de tous horizons, des cultures du monde entier s'approprient la Dunk.

Comment porter la SB Dunk aujourd'hui ?

Pour skater, évidemment

Ne l'oublions pas, c'est avant tout une chaussure de skate. L'amorti Zoom Air, la languette rembourrée, la semelle qui accroche... Tout est pensé pour la pratique. Les puristes préfèrent la version Low pour la liberté de mouvement, mais la High a ses adeptes pour le maintien de la cheville.

Dans la rue, avec style

La beauté de la SB Dunk, c'est sa versatilité. Une "Panda" (noir et blanc) passe partout – du jean slim au baggy, du jogging au chino. Les coloris plus audacieux deviennent la pièce maîtresse de votre outfit.

Petit conseil : si vous débutez, commencez par un coloris General Release (GR) plus accessible. Les "Sequoia", "Cool Grey" ou autres coloris réguliers sont parfaits pour se faire la main sans casser la tirelire.

Pour investir (mais attention)

Certains voient les SB Dunk comme un placement. C'est vrai que certaines paires ont pris une valeur folle. Mais attention, c'est un marché volatil. La Chunky Dunky qui valait 2000 dollars en 2020 en vaut 600 aujourd'hui. Achetez d'abord parce que vous aimez, pas pour spéculer.

Le phénomène culturel derrière la chaussure

La SB Dunk, c'est plus qu'une sneaker. C'est un langage, une appartenance, parfois une obsession. Elle raconte des histoires – celle du pigeon new-yorkais, du homard de Boston, de la glace Ben & Jerry's. Chaque collaboration est un récit, chaque coloris une référence.

Elle a créé des communautés entières. Des groupes Facebook aux Discord, des conventions aux pop-up stores, les fans de SB Dunk forment une vraie tribu mondiale. Ils parlent en acronymes (DS, VNDS, OG), connaissent les box colors par cœur, peuvent dater une paire à sa boîte.

Chaussures Nike SB Ben & Jerry's Dunk Low Pro Qs Chunky Dunky - STREETART.FR

Conclusion : une icône intergénérationnelle

De chaussure de basket universitaire à symbole ultime de la street culture, la Nike SB Dunk a parcouru un sacré chemin. Elle a survécu aux modes, transcendé les générations, unifié des cultures différentes autour d'une passion commune.

Aujourd'hui, que vous soyez un skateur qui veut juste une paire solide, un passionné de streetwear qui cherche la pièce parfaite, ou un collectionneur prêt à vendre un rein pour une Freddy Krueger, la SB Dunk a quelque chose à vous offrir.

Le plus fou ? Après plus de 20 ans d'existence en version SB, elle continue de surprendre, d'innover, de faire rêver. Chaque drop est un événement, chaque collaboration une célébration. Et vu le calendrier 2025, ce n'est pas près de s'arrêter.

Alors, prêt à tenter votre chance au prochain raffle ? Petit conseil d'ami : commencez à prier maintenant, vous en aurez besoin.